En 2013, 507 milliards d’emails seront envoyés dans le monde. En entreprise, un salarié reçoit en moyenne 72 emails par jour et en envoie près de 40.
Cette indigestion d’informations (on parle « d’infobésité » en français, « information overload » en anglais) est depuis longtemps identifiée comme problématique pour la santé mentale des salariés et pour leur capacité à se concentrer et à être efficace : les interruptions intempestives et les habitudes de réponse immédiate aux emails nuisent clairement à la productivité personnelle et à la prise de décision. Il me semble que c’est une des raisons qui a poussé Thierry Breton, chez Atos, à remplacer les emails par un réseau social interne – je ne sais pas si l’essai est concluant.
Cet excès d’information me fait penser à un phénomène bien connu en chute libre, qui se manifeste principalement lors du tout premier saut en solo : entre le moment où l’on quitte l’avion et celui où on ouvre le parachute (approximativement 50 secondes), le cerveau enregistre tellement de signaux nouveaux et intenses qu’il « bloque », et l’on reste figé à essayer de comprendre ce qui nous arrive pendant que l’on tombe à 180km/h vers le sol. Ca m’est arrivé lors de mon premier saut, c’est assez étrange, d’autant plus que l’on a répété au sol durant toute la journée un enchainement de gestes à faire, mais….rien à faire ! Les moniteurs de chute libre appellent ça « sensations overload« , excès de sensations. Trop d’infos devient clairement bloquant pour le cerveau, qu’on soit au bureau ou en chute libre. Or donc, parmi ce flot ininterrompu d’emails, vous voulez que les vôtres soient lus et bien lus. Comment faire pour capter l’attention de vos destinataires et faire passer efficacement vos informations ? La Harvard Business Review nous donne pour cela quelques tuyaux. C’est du bon sens, mais dans le feu de l’action, on l’oublie trop souvent…
1. Soignez votre style. L’écriture type SMS, pleine d’abréviations, non ponctuée et sans majuscule, non seulement est parfaitement abjecte à lire et dénote un vrai manque d’égard vis-à-vis de votre lecteur, mais est en outre fortement susceptible de générer confusions et explications de textes. Si votre objectif était de faire passer une info de manière brève dans un email court mais qu’il faut 15 minutes d’explications de texte au téléphone par la suite, c’est raté. Ecrire correctement un email la première fois prendra moins de temps que de l’expliquer ensuite aux destinataires.
2. Soyez direct. Allez à l’essentiel, poliment bien sûr. Tourner autour du pot pendant 3 ou 4 lignes pour demander un service ou l’exécution d’une tâche gâchera du temps d’écriture et du temps de lecture, et peut même rendre votre demande floue. Soyez donc direct, exprimez votre demande et joignez-y les précisions indispensables pour votre interlocuteur : dates limites, validations, étapes, etc… Si vous attendez de votre lecteur une « action » après avoir lu votre email (confirmation d’une information, RV, validation d’un ordre…), exprimez-là clairement au moyen d’un « call to action » qui soit le plus simple possible pour votre interlocuteur : « Peux-tu simplement me donner ton GO ou NO GO par retour de mail ? Merci » ou « Merci de m’indiquer quelle date vous convient parmi les 3 suivantes… ».
3. Soyez bref. Tout comme les présentations PowerPoint les plus longues sont les plus insupportables, les emails les plus longs sont presque automatiquement ignorés par leurs destinataires. Rappelez-vous que la « jauge d’attention » de votre destinataire est très limitée. Sans aller jusqu’à vous exprimer exclusivement en 180 caractères, tâchez de faire en sorte que votre lecteur n’ait pas besoin de scroller pour lire la fin de votre email. S’il voit au premier coup d’oeil que votre email sera vite lu , il sera nettement plus enclin à le lire.
4. Soyez narratif. Lorsque vous avez besoin d’exposer des faits ou de synthétiser un événement par email, obligez vous à être cohérent et structurez votre email autour d’un début, d’un milieu et d’une fin. C’est tout, pas de péripéties, pas de détails inutiles ou considérations personnelles. Non seulement vous-même y verrez plus clair, mais votre lecteur sera beaucoup plus facilement « pris » dans votre récit.
5. Exprimez l’objectif de votre email dans l’objet. L’objet permet au destinataire de classer immédiatement votre email dans une catégorie. La plupart des objets sont à caractère informatif, ce qui classe généralement l’email dans la catégorie « A lire plus tard (donc jamais) ». Si votre email a pour objectif de générer une action, quelle qu’elle soit, exprimez-la clairement dans l’objet (exemple : « POUR CONFIRMATION : RV lundi prochain », ou bien « POUR VALIDATION : contrat XYZ »). Plus votre requête est facile à comprendre instantanément, plus facile il sera d’y répondre.
6. Ne mettez pas tout le bureau en copie. Sale habitude que celle de vouloir tenir tout le monde informé de votre travail. Même en équipe réduite, vos emails ne concernent jamais tous vos collègues. Si un email vous est envoyé avec d’autres destinataires inclus, cela ne signifie pas nécessairement que chaque réponse doive être lue par tous. Non seulement tout le monde sera très vite lassé de ces spams, mais en plus cela ôtera à vos futurs emails l’autorité naturelle des messages envoyés rarement mais avec pertinence.
Pour terminer, une leçon de 2min46 de gestion de ses emails par la non moins passionnante FastCompany :
[…] Pas cinq, pas dix, la Harward Business School donne six clefs pour faire exister le message d’un courriel. Nicolas Beretti vous les confie sur son blog. […]